Karma : mot sanscrit qui signifie ‘action’, et qui est généralement traduit par ‘causalité des actes’. Selon les enseignements du Bouddha, ni la destinée des êtres, ni leur joie, ni leur souffrance, ni leur perception de l’univers ne sont dues ni au hasard ni à la volonté d’une entité toute-puissante. Elles sont le résultat de leurs actes passés. De même, leur futur est déterminé par la qualité, positive ou négative, de leurs actes présents. On distingue un karma collectif, qui définit notre perception générale du monde, et un karma individuel qui détermine nos expériences personnelles.
« Le karma n’est pas une fatalité, mais le reflet de la causalité, laquelle implique non seulement nos actes, mais aussi les intentions qui les animent. Lorsqu’un certain nombre de causes et de conditions sont réunies, bien que leur résultat ne soit pas aléatoire, le libre arbitre nous permet d’intervenir sur le cours des choses. Nous ne sommes donc jamais prisonniers d’un déterminisme absolu dans lequel passé et futur ne formeraient qu’un seul bloc. Ce libre arbitre permet à la créativité d’être constamment présente dans notre expérience de la vie. L’Anguttara Nikaya rapporte ces paroles du Bouddha :
‘Mes actes sont ma possession,
Mes actes sont mon héritage,
Mes actes sont la matrice qui m’enfante,
Mes actes sont mon refuge.’
Le karma ressemble plus à un potentiel, à une lettre de crédit qu’à une nécessité. On pourrait le considérer comme une loi naturelle faisant intervenir la conscience. Selon cette loi, une pensée ou un acte positif conduit au bonheur, et une pensée ou un acte négatif au malheur. Une pierre tombe sous l’influence de la gravité, à moins que l’on exerce sur elle une nouvelle force, par exemple en l’attrapant au vol pour la relancer vers le haut. De la même façon, on peut transformer le processus karmique avant qu’un acte ait produit ses effets plaisants ou douloureux. On peut, avant que les émotions négatives n’aient porté leurs fruits, réparer un tort commis envers les autres, contrecarrer la haine par la patience, remédier à l’avidité par le détachement, à la jalousie par la joie de voir quelqu’un heureux. La loi du karma ne signifie pas que notre sort soit scellé depuis toujours et à jamais et que nous fonctionnons comme des automates qui s’ignorent. À chaque instant nous faisons l’expérience de l’interaction de notre passé avec le présent et nous sommes libres de construire le futur, de laisser s’exprimer l’amour ou la haine.
Nous sommes le résultat d’un grand nombre de décisions prises librement, même s’il est parfois difficile de s’émanciper de l’influence de nos tendances karmiques. Cette émancipation est au cœur du travail intérieur. Ce que nous deviendrons dépend donc de l’usage que nous faisons de cette liberté. Il n’y a pas d’acte fortuit ; chaque acte est sous-tendu par une intention. La notion de responsabilité morale est donc facile à comprendre : ainsi que je l’ai mentionné au début de nos entretiens, il n’y a pas de Bien ni de Mal, mais seulement le bien et le mal que nos pensées et nos actes engendrent. Nous sommes responsables de nos vies comme l’architecte (l’intention) et le maçon (l’acte) répondent de la qualité d’une maison. »
Matthieu Ricard, Trinh Xuan Thuan, L’infini dans la paume de la main, Fayard, 2000, pp. 185-186 et 453 (définition)
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