« Le karma a été utilisé pour justifier rationnellement le racisme, les castes, l’oppression économique, les handicaps à la naissance, etc. Si on l’interprète à la lettre, le karma justifie l’autorité des élites politiques censées mériter leur richesse et leur pouvoir ainsi que la subordination de ceux qui n’ont ni l’un ni l’autre. (…) S’il existe une relation causale infaillible entre les actes d’un être et son destin, il n’est plus besoin de travailler à une justice sociale parce qu’elle est déjà inscrite dans la structure morale de l’univers. En fait, si aucune souffrance n’est imméritée, il n’y a pas non plus de mal contre lequel nous devions lutter : tout s’équilibre en fin de compte.

Je me rappelle les réflexions d’un enseignant bouddhiste sur l’holocauste des juifs dans l’Allemagne nazie durant la Seconde Guerre mondiale : « Quel terrible karma devait être celui de tous ces juifs… » Ce type d’interprétation « intégriste », qui rend les victimes responsables et rationalise leur épouvantable destin est quelque chose que l’on ne peut plus tolérer en silence désormais. Il est temps pour les bouddhistes et le bouddhisme modernes de dépasser ce type de position en assumant notre responsabilité sociale et en trouvant les moyens de réagir à de telles injustices. »

David R. Loy, Notes pour une révolution bouddhiste, Kunchab+, Bruxelles 2010, p. 67

Les textes proposés sur le blog de Shikantaza expriment avant tout l’opinion de leurs auteurs. Les lecteurs sont invités à les examiner avec l’esprit de libre arbitre prôné par le Bouddha dans le Kalama Sutta.

Cf. Karma (Philippe Cornu) et Karma (David Loy)